La communication de crise chez Éminence

communication de crise
Interview de Dominique Seau

Président du groupe Éminence

« Communication de crise : il faut surmonter la peur »

Dans notre précédente tribune du 17/09, Dominique Seau, PDG du groupe Éminence, nous retraçait l’histoire de sous-vêtements devenus masques en pleine crise sanitaire. Aujourd’hui, suivons-le dans les coulisses de la gestion de crise.

Communication interne/communication externe

Comment avez-vous communiqué avec vos salariés ?

Pour motiver l’ensemble des salariés, je me suis appuyé sur la communication interne et externe.

  • Communication interne :

Quand les gens ont peur, il est important de faire de la communication directe. La communication de crise consistait à s’adresser personnellement à chacun par mail. Le message était : « Il faut surmonter la peur. Nous faisons une activité essentielle. Les professionnels de la santé nous protègent, on doit les protéger ».

Il fallait expliquer, donner des arguments aux partenaires sociaux et aux cadres.

  • Communication externe

Les articles notamment du Midi Libre (quotidien le plus lu par les salariés) ont aidé à convaincre. Les salariés étaient fiers d’agir. Cela a donné une dynamique positive.

J’ai également bénéficié du soutien d’autres relais : ainsi, la sous-préfète du Vigan, Joëlle Gras, a joué un rôle capital en faisant passer Éminence en activité essentielle. Cela permettait d’aller travailler et de transporter les masques sans se faire arrêter aux barrages par les gendarmes.

De plus, les médecins du travail et l’inspection du travail ont validé les mesures prises et rassuré ceux qui reprochaient à l’entreprise de faire passer l’activité économique avant la sécurité des salariés. Il a fallu d’une part rassurer, d’autre part se conformer aux nouvelles normes : les masques du début se sont vite révélés inadaptés.

Une semaine après avoir fermé, les salariés de Sauve ont accepté de rouvrir. Il n’y a eu aucun refus. Certains se sont même plaints de ne pas avoir été sollicités.

Et pourtant le travail est répétitif. Le niveau des salariés est bien supérieur à ce que requiert la fabrication de masques. Le bouche à oreille a bien fonctionné, grâce à la presse, aux amis, aux familles.

Menace et opportunité

Vous avez parlé au début de notre entretien d’opportunité. Vous savez que menace et opportunité ont le même idéogramme ?

Oui, j’ai pris plusieurs années de cours avec un intellectuel chinois victime de la révolution culturelle. Les circonstances changent parfois drastiquement. Je suis un ancien marin. En cas de tempête, soit on met le cap pour rentrer au port et éviter le grain, soit on prend la décision d’aller plus vite que la tempête. C’est le choix que j’ai fait.

De plus, les ventes s’étaient effondrées, les clients ne payaient plus leurs factures. Il y avait donc un problème de trésorerie. Il fallait payer les factures, faire les avances, même si du point de vue administratif, le gouvernement a fait preuve d’une grande réactivité avec les mesures de chômage partiel. Faire travailler les gens permettait de continuer à verser 100% des salaires et les primes. 80% des salariés gagnent moins de 2000 €/mois. Un manque à gagner de 20% représente beaucoup pour eux…

Dans la prochaine Tribune libre du 15 octobre, nous aborderons avec Dominique Seau un concept porté aux nues par les uns, voué aux gémonies pour les autres, la mystérieuse « raison d’être »…

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